La route de Ness by Alice de Poncheville

La route de Ness by Alice de Poncheville

Auteur:Alice de Poncheville [Poncheville, Alice de]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Jeunesse
ISBN: 9782812620928
Éditeur: Rouergue Jeunesse
Publié: 2021-05-03T22:00:00+00:00


Le lendemain, Zéno demanda à voir le lac, mais il refusa absolument de s’y tremper. Tel un chien sauveteur, il surveilla les baigneurs, tendit l’oreille au moindre cri. En même temps que la surface agitée, il voyait l’étendue profonde du lac et, croyant dur à la force de son esprit, il obligeait les silures à rester couchés sur leur lit de vase.

Par sa fenêtre, Cramet avait repéré la vieille dame et l’enfant, mais il ne leur prêta pas une attention particulière. Ils lui étaient devenus familiers comme de vieux jouets. Ceux qui mobilisaient maintenant toute son intelligence, c’était les deux jeunes, assis sur la petite plage, cachés par les barques.

Cramet attendit patiemment que le jour baisse. Les gens s’en allaient maintenant par petits groupes ; pour l’homme chaque départ était un encouragement. Élise dressa le couvert et s’inquiéta de ne pas voir son client débarquer dans la salle à manger.

Elle frappa à sa porte :

– Vous ne dînez pas, ce soir ?

Il grogna un « non ».

– Bien, monsieur. À demain matin.

Cramet revêtit son gilet à poches et y rangea ses outils de travail. Il remonta la fermeture jusqu’à son menton, releva son col. Plus personne ne traînait dans les parages, à part le jeune couple.

Il ouvrit sa fenêtre et fut dehors avec la rapidité d’un lézard. Après avoir longé l’établissement sur la gauche, il marcha en se fondant dans les ombres, comme il savait si bien le faire. Chaque tache de nuit l’accueillait et prenait sa forme. Vers le départ du sentier de la forêt, il attendit le passage du couple, immobile comme une stèle entre les troncs.

Les amoureux arrivèrent d’un bon pas, sans se tenir la main, attentifs aux faisceaux de leurs lampes de poche. Ils s’arrêtèrent un instant à quelques mètres seulement de l’homme.

– Un décilitre ? demanda Madeleine.

– Un dixième de litre, répondit Luc.

– Et un hectolitre ?

– Mille litres.

– Perdu, dit-elle. Je t’embrasserai quand tu sauras ta leçon !

Elle se mit à courir de toutes ses forces.

– Attrape-moi si tu peux !

Le garçon lui cria « Tu triches ! » avant de courir à son tour, comme aspiré dans son sillage. Parfait, se dit Cramet, je commencerai par lui. Il prit une profonde respiration et s’élança.

Luc balayait le chemin de sa lumière, tout en sautant les obstacles. Derrière, Cramet avait parfaitement calé sa course sur celle du jeune homme.

Devant eux, la jeune Madeleine avait disparu, mais de temps à autre, elle criait « Lu-uc ! Lu-uc ! »

Le garçon ralentit à l’entrée de la clairière. « Lu-uc ! » Puis il se positionna bien au milieu et s’accroupit sur le sol, essoufflé.

– Viens me chercher ! cria-t-il.

Soudain, Cramet surgit de l’ombre et se précipita sur lui. Luc se releva d’un bond, l’évitant de justesse. Cramet allait lui saisir la cheville quand une forte lumière éclata.

Un anneau brillant se dessina tout autour d’eux, délimitant nettement la clairière. Au centre, Cramet, surpris, cligna des yeux. Luc en profita pour se précipiter sur le côté et disparut en un éclair, absorbé par la lumière.



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